Les différences émotionnelles et affectives entre hommes et femmes surdoués
Dans la lignée de différents articles sur les distinctions réelles et supposées de la douance hommes / femmes, voici un article qui focalise spécifiquement sur des aspects subjectifs et difficilement mesurables. Les différences entre hommes et femmes surdoués, en termes de dimensions émotionnelles et affectives sont façonnées par des facteurs biologiques, psychologiques, sociaux et culturels, et influencent profondément la manière dont ces individus perçoivent le monde, gèrent leurs émotions et interagissent avec leur environnement. Toutes ces observations ne tiennent cependant pas toujours compte dans leur description de trois variables indispensables à la compréhension de l’écart potentiel que nous tentons d’aborder dans cet article ; l’éducation, l’environnement, l’évolution de l’individu au fil des années. Comment penser que ces traits sont innés, stables dans le temps et qu’ils ne sont pas liés à une éducation, un rôle à tenir dans la société aussi, et surtout, qu’ils n’ont pas d’implications plus ou moins grande dans le développement des capacités émotionnelles.
Car dans la pensée collective et malgré la contribution du féminisme à une société plus égalitaire, certains éléments sont indiscutables, l’homme est fort, il défend sa famille, va à la guerre et jusqu’à très récemment le fait qu’il montre ses états d’âmes n’était pas valorisé. De son côté, la femme est plutôt sensible, empathique et patiente car elle s’occupe de l’éducation des enfants et de la famille. Ce n’est pas lié à un vieux concept patriarcal, c’est une vérité anthropologique depuis des milliers d’années que certaines grandes figures du féminisme aux états unis n’ont jamais niés. Une citation de féministe engagée qui va dans le sens de cette question de l’éducation émotionnelle que je trouve pleine de lucidité et de pertinence :
Gloria Steinem est une féministe, journaliste, rédactrice en chef, directrice de publication, documentariste, essayiste américaine. Militante du mouvement de libération des femmes, elle est une figure majeure du mouvement dit de la deuxième vague féministe : « We’ve begun to raise daughters more like sons... but few have the courage to raise our sons more like our daughters. »
Cette citation est d’une profondeur inouie. Tout cela est il spécifique aux HPI ? Bien sûr que non.
Maintenant que le contexte est clarifié, que constate t’on ?
Sensibilité Émotionnelle et Empathie
Les données empiriques semblent montrer que les femmes surdouées ont tendance à manifester une sensibilité émotionnelle et une empathie plus prononcée que leurs homologues masculins. L’étude de Haier et al. (2005) montre des différences neurobiologiques qui affectent la manière dont les problèmes sont résolus sans différence d’efficacité cognitive. Les hommes ont montré une plus grande activation dans les régions du cerveau associées au raisonnement spatial et aux compétences motrices, tandis que les femmes avaient une plus grande activation dans les régions liées au traitement des émotions et aux compétences verbales.
Si l’on associe cela aux observations anthropologiques et à l’éducation, cela pourrait expliquer leur tendance à être plus sensibles aux émotions des autres et à exprimer leurs propres sentiments de manière plus ouverte.
D'un autre côté, les hommes surdoués peuvent aussi faire preuve d'une grande sensibilité émotionnelle, mais ils ont tendance à la manifester de manière différente. Ils peuvent être plus réservés dans l'expression de leurs émotions, ce qui est souvent en ligne avec les normes culturelles qui valorisent la retenue émotionnelle chez les hommes (ScienceDaily). Cependant, lorsqu'ils se sentent en confiance ou que cette liberté leur est laissée, ils peuvent exprimer leurs émotions de manière intense et profonde, souvent à travers des activités intellectuelles ou créatives.
Gestion du Stress et des Émotions
Les différences dans la gestion du stress et des émotions entre hommes et femmes surdoués ont également été abordés. Les femmes surdouées, confrontées à des situations stressantes, sont plus susceptibles de rechercher un soutien social, en discutant de leurs préoccupations avec des amis ou des proches. Cette tendance est renforcée par des normes sociales qui encouragent les femmes à être plus ouvertes émotionnellement.
Les hommes surdoués, en revanche, peuvent préférer des stratégies de gestion du stress plus introspectives, comme la réflexion personnelle ou l'engagement dans des activités intellectuelles ou physiques pour détourner leur attention des sources de stress. Cette différence peut s'expliquer par des attentes culturelles qui encouragent les hommes à se montrer indépendants et à résoudre leurs problèmes seuls.
Manifestations des "Surexcitabilités"
Kazimierz Dabrowski a introduit la notion de "surexcitabilités", qui se manifestent de manière distincte chez les hommes et les femmes surdoués. Les femmes surdouées montrent souvent des surexcitabilités émotionnelles plus visibles, caractérisées par une intensité émotionnelle élevée, une forte empathie, et une capacité à se connecter profondément avec les autres. Les hommes surdoués, en revanche, peuvent manifester des surexcitabilités intellectuelles plus marquées, se traduisant par une passion pour l'apprentissage, un amour des idées complexes et une capacité à se plonger profondément dans leurs intérêts intellectuels qui peuvent aussi être l’intérêt pour l’humain, les relations personnelles et l’apport des émotions et de l’intuition, etc. même si c’est plus rare.
Facteurs Socioculturels et Attentes de Genre
Les différences observées dans les expériences émotionnelles et affectives des hommes et des femmes surdoués ne peuvent être entièrement comprises sans prendre en compte les facteurs socioculturels et les attentes de genre. Les normes de genre dans l’éducation comme expliqué en introduction influencent non seulement la manière dont les émotions sont exprimées et perçues, mais aussi comment les hommes et les femmes surdoués sont soutenus dans leurs développements personnels et professionnels.
Les femmes surdouées peuvent se heurter à des stéréotypes qui les poussent à réprimer leur ambition ou à se conformer à des rôles traditionnels, tandis que les hommes peuvent se sentir contraints de cacher leur vulnérabilité émotionnelle pour se conformer aux attentes de force et d’indépendance.
Ces différences soulignent l'importance d'une approche individualisée dans le soutien des individus surdoués, qui prend en compte les besoins spécifiques et les défis uniques que chaque sexe peut rencontrer. En reconnaissant et en honorant ces différences, nous pouvons mieux soutenir les hommes et les femmes surdoués dans leur quête de réalisation personnelle et professionnelle sans devoir recourir à des offres spécifiques.
Références
- Vanderbilt University. "Gifted men and women define success differently, 40-year study finds." ScienceDaily. 19 November 2014. https://www.sciencedaily.com/releases/2014/11/141119101700.htm
- Beyond High IQ: Why Giftedness Is Not Just a Number | Psychology Today. https://www.psychologytoday.com/intl/blog/living-with-emotional-intensity/202407/beyond-high-iq-why-giftedness-is-not-just-a-number
- Frederickson, N. (2002). Giftedness and Gender: An Overview of Some Important Issues. Educational Psychology, 22(1), 111-129.
- Cross, T. L. (2011). The Social and Emotional Lives of Gifted Kids: Understanding and Guiding Their Development. Prufrock Press.
- Neihart, M., Reis, S. M., Robinson, N. M., & Moon, S. M. (Eds.). (2002). The Social and Emotional Development of Gifted Children: What Do We Know? Prufrock Press.